Pour répondre à cette question, posée dans un article publié dans l’édition du Monde du 7 mars 2011, « Eduquer au XXIème siècle », l’académicien Michel Serres ne nous livre aucune donnée statistique de nature sociologique. En tant que philosophe, c’est un portrait du « nouvel écolier » qu’il propose à ses lecteurs, en comparaison directe avec celui du siècle précédent dont il est issu.
D’après Michel Serres, les élèves français du XXIème siècle sont des enfants principalement désirés, à l’espérance de vie accrue, n’ayant jamais connu la guerre et peu confrontés à la douleur.
Citadins baignant dans le multiculturalisme, « ils ne parlent plus la même langue » que leurs aînés, comme viendrait l’illustrer, aux yeux du philosophe, l’ajout de 30000 mots entre la nouvelle publication du dictionnaire de référence de l’Académie française et la précédente, contre 4000 à 5000 aux siècles précédents.
Leur rapport au temps, à l’espace et au savoir s’avère également bouleversé, puisque « par téléphone cellulaire, ils accèdent à toute personne ; par GPS, à tout lieu ; par la Toile, à tout savoir ».
« Ils sont formatés par les médias, diffusés par des adultes qui ont méticuleusement détruit leur faculté d’attention en réduisant la durée des images à sept secondes et le temps des réponses aux questions à quinze secondes, chiffres officiels. »
Confronté à toutes ces « mutations », l’enseignement devra donc, selon Michel Serres, évoluer « hors des cadres désuets qui formatent encore nos conduites » :
« De même que la pédagogie fut inventée par les Grecs, au moment de l’invention et de la propagation de l’écriture ; de même qu’elle se transforma quand émergea l’imprimerie ; de même, la pédagogie change[ra] totalement avec les nouvelles technologies ».
Selon quelles modalités ? Le philosophe déplore de rester sans réponse à cette nouvelle question posée, mais reconnaît cependant à cette dernière le mérite d’ouvrir sur ce qu’il appelle… « d’inimaginables nouveautés ».
Nathalie Anton